samedi 5 avril 2008

Cancer et environnement

Annie Sasco, épidémiologiste à l'Inserm
"Face au cancer, il existe des éléments que l'individu ne peut pas contrôler"
LE MONDE 01.04.08

Médecin épidémiologiste, le docteur Annie Sasco a travaillé plus de vingt ans au Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Elle est désormais directrice de recherche à l'Inserm (unité 897-Bordeaux), responsable de l'équipe épidémiologie pour la prévention du cancer.Question : Dans son rapport du 18 février, l'académie nationale de médecine note une diminution du nombre de cancers du sein depuis 2005 et l'attribue à la moindre utilisation des traitements hormonaux substitutifs (THS). Les études scientifiques mettant en cause les effets secondaires des THS datent du début des années 2000.

Peut-on, si vite, mesurer l'impact d'un moindre recours à ces traitements ?
Réponse : Les produits de nature hormonale peuvent avoir deux types d'action. Soit être un cancérogène au sens traditionnel du terme, c'est-à-dire capable d'induire une mutation de l'ADN, soit être un excellent facteur de croissance, donc favoriser la croissance des cellules, en particulier des cellules cancéreuses. Comme il s'agit d'un effet de promotion à relativement court terme, cela peut expliquer que, si on supprime le THS chez des femmes qui, du fait de leur âge, sont susceptibles d'avoir dans leurs organismes quelques cellules cancéreuses (ce qui ne veut pas dire que toutes feront un cancer), on parvienne à une baisse rapide du nombre de cancers. Chez certains individus, des cellules cancéreuses peuvent rester tranquilles dans leur coin, contrôlées par l'organisme. Mais si on les aide à pousser en leur donnant des facteurs de croissance elles vont se réveiller. Néanmoins, le cancer qui arrive n'est pas forcément lié uniquement au THS. Il y a toujours plusieurs facteurs mais le THS peut favoriser l'apparition du cancer du sein.

Q : L'académie prend position en faveur de la chimioprévention pour les femmes étant - pour des raisons génétiques - exposées à très haut risque au cancer du sein. Qu'en pensez-vous ?
R : Je pense qu'il est urgent d'attendre et que, de toute façon, cela ne peut pas être une solution pour l'ensemble de la population. La médicalisation croissante n'est pas la seule solution. Actuellement, on assiste à un dérapage : on traite des gens qui ne sont pas encore malades pour éviter qu'ils ne tombent malades. C'est vrai dans beaucoup de pathologies (hypertension, cholestérol, etc.). Le problème est que nous ne sommes pas sûrs de réellement empêcher la survenue de la maladie et que sont utilisés des médicaments, peut-être efficaces, mais agressifs, avec des effets secondaires. Même lorsqu'ont été proposés des médicaments considérés comme non dangereux, tels que les vitamines (bétacarotène, alpha-tocophérol), pour éviter le cancer du poumon chez les fumeurs, cela n'a pas marché. On avait remarqué que les gens qui développaient un cancer du poumon avaient des taux de vitamines dans leur sang plus bas. L'idée a alors été de leur donner un supplément de vitamines. Un premier essai réalisé, il y a quinze ans, en Finlande, a montré que ceux à qui on avait donné des vitamines avaient fait plus de cancers du poumon que ceux à qui on n'avait rien donné. Il n'est jamais neutre de modifier, par des moyens pharmacologiques, les apports des gens. Dans l'alimentation, c'est pareil. Il faut être naïf pour croire qu'avec quelques molécules chimiques insérées dans des gélules on reproduit tous les effets d'une classe d'aliments. C'est rechercher la facilité sous prétexte qu'il est plus facile de prescrire que de proscrire.

Q : Comment améliorer la prévention vis-à-vis du cancer ?
R : Dire qu'il ne faut pas fumer, boire le moins d'alcool possible, avoir une alimentation équilibrée, de préférence sans trop de résidus de pesticides et de polluants divers, faire de d'exercice physique, tout cela est très bien. Mais il existe d'autres éléments que l'individu ne peut pas contrôler : l'air qu'il respire, l'eau qu'il boit, l'endroit où il habite, l'exposition aux champs électromagnétiques. Il faudrait être plus drastique notamment sur les pesticides. Aujourd'hui, quand on fait un repas normal, en France, on est exposé aux résidus de 21 pesticides. Il faudrait davantage éliminer de notre mode de vie et de notre environnement les composés dont on sait avec certitude ou que l'on soupçonne très fortement d'être des cancérogènes pour l'être humain. Mais on se heurte à des intérêts commerciaux. Cela relève de décisions politiques sur lesquels chacun d'entre nous peut peser.

Q : Mais les récentes études montrent que le rôle joué par l'environnement (eau, air, alimentation) est extrêmement minime, inférieur à 1 %, dans les causes des cancers...
R : Les chiffres dont on dispose reflètent ce qui s'est passé au cours des trente dernières années. Il y a quarante ans, il y avait infiniment moins, dans notre environnement, de pesticides ou de champs électromagnétiques. Le téléphone portable, le Wi-Fi n'existaient pas. Or le cancer est un effet secondaire à long terme. Il faut vingt ou quarante ans, pour faire un cancer. Les effets du téléphone portable, par exemple, commencent juste à être entraperçus. Nous baignons dans les ondes. Qu'il s'agisse de l'alimentation, des radiations ionisantes, des champs électromagnétiques, des dioxines, ou encore de certains cosmétiques, faut-il attendre une certitude absolue ? Ou dire qu'il faudrait quand même faire attention parce que nous avons des données chez l'animal et quelques-unes sur l'être humain qui ne sont pas vraiment rassurantes. Pour les cosmétiques, il faut savoir que ce n'est pas le prix qui fait la différence de qualité.

Q : Cela risque de faire beaucoup de choses vis-à-vis desquelles on serait censé faire attention...
R : Je ne veux pas angoisser les populations. Mais il est légitime de poser ces questions. L'augmentation du nombre de cancers est liée en partie au vieillissement de la population et au dépistage (c'est caricatural pour la prostate), mais cela est loin de tout expliquer. Le 27 novembre, à l'université Qinghua de Pékin, Nicolas Sarkozy, lui-même, a déclaré : "Les opinions publiques demandent que nous agissions ensemble pour que cesse le scandale des cancers dus à la pollution". Je suis pleinement d'accord.

Colloque international : Agriculture Biologique et changement climatique.

Colloque international scientifique et professionnel Agriculture biologique et changement climatique Contribution de l’agriculture biologique et de nos choix alimentaires à l’effet de serre 17 et 18 avril 2008 Enita Clermont, Lempdes, FranceLa réalité du changement climatique et ses conséquences sécheresses, inondations, diminution de la biodiversité etc. sont largement admises, mais dans quelle mesure la pratique de l’agriculture biologique réduit-elle ce fort impact ?La réalité du changement climatique du fait des activités humaines et ses conséquences en terme d’accidents climatiques (sécheresses, inondations…), de diminution de la biodiversité, de risques sanitaires, etc. sont admises par une large majorité de personnes. Or, l’agriculture est la principale source de ces deux gaz. Les émissions de méthane proviennent principalement du tube digestif des ruminants et de la fermentation des effluents d’élevage (fumier, fientes, lisier). Celles de protoxyde d’azote proviennent de la fertilisation azotée et, dans une moindre mesure, des effluents d’élevage. Au total, l’agriculture contribue en France à l’effet de serre à hauteur de 19 %, et, en incluant les secteurs amont et aval, à plus de 30 % des émissions, toutes sources confondues. Toutes ces données posent trois questions par rapport aux orientations de l’agriculture, et en particulier pour les agriculteurs et les consommateurs qui optent pour les produits biologiques : 1. Dans quelle mesure la pratique de l’agriculture biologique réduit-elle ce fort impact ? 2. Que peut-on changer dans les techniques de ce mode de production et dans nos habitudes alimentaires pour aller encore plus loin dans la réduction de cet impact ? 3. Quel conséquences aura le changement climatique sur l’agriculture biologique ? Objectifs du colloque Les objectifs de ce colloque international scientifique et professionnel sont : - de faire le point des connaissances actuelles sur ce thème, - de mettre en évidence les données indiscutables, mais aussi les lacunes, encore nombreuses, dans nos connaissances, en vue de déterminer les besoins de recherche, - d’éclairer sur les pistes d’actions possibles au niveau des décideurs, des agriculteurs, des différents acteurs de la filière agro-alimentaire et des consommateurs, - de favoriser les échanges entre les scientifiques et les professionnels. Parmi les participants, figureront notamment Bernard Seguin directeur de recherche à l’unité Agroclim d’Avignon et Jean-François Soussana, directeur de recherche à l’unité d’Agronomie de Clermont Ferrand. Tous deux ont contribué à la rédaction du 4 rapport du GIEC paru en 2007 etc.Plus d'information sur le colloque >>> Téléchargez le programme complet :http://www.mdrgf.org/pdf/Programme_colloque_agriculture_170408.pdf>>> Contact: Secrétariat colloque Annabel Barthélemy ENITA Clermont, Marmilhat, BP 35, F-63370 LempdesTel : +33 (0)4 73 98 13 29 / Fax : +33 (0)4 73 98 13 90 Internet : www.enitac.fr >>> Lieu du colloque : Site de Marmilhat - BP 35 - 63370 Lempdes Tél. : 04 73 98 13 13 - Fax : 04 73 98 13 00 >>> Dates : le 17 avril de 9h à 19h suivi d’un buffet et le 18 avril de 8h30 à 18hLe samedi matin possibilité de visiter une exploitation en Agriculture biologique Maraîchage ou une exploitation en Agriculture biologique Élevage